fleur O5✿12

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(voir avant la fleur O5✿11 : Tybert qui rêvait d’être vert)

bouquet du chat/ O5✿10
✔ fleur O5✿12 : La légende du Mélèze

« Devenir tout vert ? Non merci ! Je préfère ma couleur rousse, répliqua Zakou. Je suis content d’être comme je suis. »

« Tu me fais penser à l’histoire des mélèzes que me racontait autrefois Philothée, quand je n’étais pas satisfait de mon sort et que la jalousie m’empêchait de dormir. Elle me répétait que la grandeur d’un arbre dépend de ses racines, pas de sa couleur. »

« N’empêche, reprit Tybert intéressé, que ces arbres sont bien heureux d’être couverts de feuilles vertes, comme ce frêne. Et alors que t’a raconté cette vielle chouette ? »

«Une belle légende, qui a bercé mon enfance : on raconte qu’il y a bien longtemps ” il y des lunes et des lunes de cela, avant même que ne tombent sur terre les grandes eaux du ciel”, vivait un jeune conifère isolé, à proximité d’une grande forêt de feuillus.

Le Mélèze, rêvait d’être comme les autres arbres, qui possèdent de belles feuilles vertes, alors que lui n’avait que des aiguilles piquantes, comme tous les conifères.
Portant, tous les 3 ou 4 ans, fleurissaient sur ses branches de superbes “roses de mélèze”, mais il trouvait l’événement trop rare, et il était jaloux des belles feuilles des autres arbres à chaque automne…

La nature l’avait pourtant gâté, en dotant le mélèze de graines ailées pouvant germer à des dizaines de kilomètres de là, et jusqu’à 3 ou 4 ans après leur envol si le sol était assez humide. Mais cela ne lui suffisait toujours pas.

Il était jaloux, et spécialement des frênes qui sont des arbres bien verts de caractère. Les frênes sont en effet les derniers à se couvrir de feuilles au printemps, et les premiers à s’en débarrasser à l’automne, alors qu’elles sont encore vertes !

Les plaintes du mélèze montaient sans cesse vers le ciel, emportées par le vent. Il était toujours insatisfait de son sort, malgré les dons différents que lui avait donnés la nature. Il rêvait d’être autre, d’avoir de belles feuilles toutes vertes.

Et on raconte que finalement sa plainte fut rapportée à Ruah, le souffle invisible du vent, qui lui accorda de vivre comme les autres feuillus le temps d’un cycle de quatre saisons.
Mais son rêve tourna vite au cauchemar. Savez-vous ce qu’il arriva ? Au printemps une chèvre lui brouta tout le bas de ses belles feuilles vertes, et il eut honte de sa nudité !

Puis l’été arriva, et il transpira sous sa grosse couverture végétale si dense. “Il fait maintenant trop chaud la-dessous, autrefois au moins mes aiguilles formaient un habit plus aéré” se dit-il.

“Il arrivait même parfois, au temps de mes aiguilles, que des chenilles tordeuses dépouillent mes rameaux en plein été à force d’y entortiller leurs fils de soie. Mais là cette couverture de feuille m’étouffe ».

Pourtant quand l’automne arriva, il fut très fier au début de ses grandes feuilles d’or. Mais il n’eut à peine le temps de s’admirer que son trésor commença à tomber. Il perdait toute sa parure… quel dépouillement cruel !

Enfin vint l’hiver, qui le retrouva nu, dans le vent glacial, sans même quelques aiguilles qui le protégeaient autrefois. Heureusement que son écorce était très épaisse ! »
En écoutant cela, Tybert commença à comprendre que son désir de changer de pelage n’était pas forcément la solution à tout.

« Et l’on dit, conclua Zakou, que depuis ce temps là les Mélèzes ont repris habit de conifère. Mais que c’est pour cela qu’ils doivent faire exception, chaque hiver, en perdant toutes leurs aiguilles, contrairement aux autres résineux. »

 

voir ensuite
fleur O513 rencontre une souris grise
fleur O514 danse comme les aiguilles vertes dans le vent
fleur O515 enterrement avec l’herbe des prairies
fleur O516 dans le feu des orties
fleur O517 plongée dans l’eau des nénuphars

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